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Quelles sont les étapes de fabrication du rhum?

Les matières premières

La canne à sucre, plante appartenant à la famille du genre saccharum, tire principalement profit de l’espèce officinarum, fruit de croisements génétiques séculaires, pour sa contribution à la production de sucre et à la fabrication du rhum. Au fil des siècles, ces croisements avec des plantes similaires ont visé à renforcer sa résistance face aux maladies adaptées à de nouveaux environnements et à améliorer son rendement.


Son origine géographique précise demeure incertaine, même si plusieurs études suggèrent son émergence en Nouvelle-Guinée, localisée dans la région de Mélanésie, en Océanie, il y a environ 8000 ans. Sa diffusion aurait commencé il y a six millénaires dans certaines îles d’Indonésie et de Malaisie, pour se propager ensuite en Inde et en Chine vers 2500 avant J.-C. Par la suite, sa culture s’est étendue jusqu’en Égypte, en Palestine, en Sicile et dans le sud de l’Espagne, profitant de conditions climatiques et d’une irrigation favorables à sa croissance.


Ce n’est qu’au 16ème siècle, peu après la découverte du Nouveau Monde par Christophe Colomb, que la culture de la canne à sucre a débuté sur le continent américain. Malgré son lien culturel fort avec les Antilles et les territoires d’Outre-Mer, sa présence sur ces terres date de l’époque coloniale.


Dès 1516, la République Dominicaine, alors nommée Hispaniola, exporte du sucre vers l’Espagne. La culture de la canne à sucre s’est intensifiée à mesure que les conquistadors ont conquis les terres aztèques et incas, soumettant les populations autochtones.
Au 16ème siècle, la culture de la canne à sucre, à l’origine de la production de rhum, s’est étroitement mêlée à la colonisation et à la traite des esclaves, au cœur des rivalités entre les grandes puissances coloniales telles que l’Espagne, le Portugal, la France, l’Angleterre, les Pays-Bas et le Danemark, pour lesquelles le sucre représentait un enjeu économique crucial. En 1619, un flibustier français anonyme rapporte la présence de la canne à sucre en Martinique et dans les Petites Antilles.


En termes de production de rhum, on distingue généralement deux catégories : celles issues de la distillation du jus de canne, appelé vesou, et celles provenant de la mélasse. Le jus de canne, rapidement altéré après le broyage, doit être fermenté puis distillé pour obtenir du rhum agricole. En revanche, la mélasse, sous-produit du raffinage du sucre de canne, constitue un sirop épais et visqueux non seulement utilisé dans la fabrication de desserts, mais aussi comme base pour de nombreux types de rhum.


La canne à sucre, connue scientifiquement sous le nom de « Saccharum officinarum », pousse dans des régions équatoriales et tropicales telles que la Floride, le Texas, la Louisiane, les Antilles, Hawaï, l’Amérique centrale et du Sud, ainsi que dans plusieurs régions d’Asie et d’Océanie. Elle présente de nombreuses variétés aux caractéristiques variables en termes de résistance aux maladies et de teneur en sucre. Composée d’eau, de fibres et de saccharose, c’est dans la base de la canne que le saccharose est concentré.


La récolte se fait à 11 mois, avant la floraison de la plante, soit manuellement soit mécaniquement. Les parties supérieures des cannes sont abandonnées dans les champs pour que seules les bases soient rapidement acheminées vers les sucreries, afin d’éviter les pertes de sucre. Après avoir été transformée en fibres, la base de la canne est pressée avec de l’eau chaude pour en extraire le jus sucré. De ce processus émergent deux produits : le jus de canne pour la production de rhum et la bagasse, constituée de résidus fibreux utilisés comme combustible. Dans le cas du rhum issu de la mélasse, le jus de canne est appauvri en sucre par extraction pour ensuite être transformé en mélasse.

Le processus de fabrication du Rhum

Abordons un sujet centrale mais souvent complexe pour de nombreux amateurs. Comme souvent, ce sujet s’avère bien plus complexe qu’il n’y paraît à première vue. Cependant, avec quelques explications, tout deviendra plus clair.
Les matières premières utilisées pour l’élaboration du rhum se révèlent multiples. Le rhum étant une eau-de-vie de canne à sucre, plusieurs produits dérivés de cette plante peuvent servir à sa création. généralement deux matières premières sont utilisées pour produire du rhum : la mélasse et le jus de canne.


La mélasse, de loin le produit le plus utilisé, constitue plus de 90 % des rhums dans le monde. C’est historiquement la méthode de production la plus courante. Définition : la mélasse est un liquide sirupeux issu du raffinage du sucre, contenant encore une proportion de sucres fermentescibles. Autrefois, le rhum était un sous-produit des sucreries, permettant d’utiliser la mélasse. Les rhums obtenus à partir de la mélasse développent des notes de cassonade, de sucre brûlé et d’épices, malgré un aspect proche du caramel et un goût peu sucré de réglisse.


Le jus de canne est utilisé pour produire les « Rhums Agricoles » dans les DOM-TOM et à Madère, ainsi que les « Rhums de Pur Jus de Canne » ailleurs. Il est extrait mécaniquement par broyage de la canne à sucre dans des moulins. Les rhums élaborés à partir de jus de canne proposent un profil aromatique frais et végétal, mettant en avant la canne à sucre.
La fabrication du rhum s’articule autour de deux méthodes majeures : le rhum agricole et le rhum de mélasse. Ces deux approches distinctes offrent des expériences gustatives variées, tout en partageant certains points clés du processus de production.


Le Rhum Agricole
Le rhum agricole prend ses racines dans le vesou, le jus frais de canne, laissé à fermenter pendant quelques jours. Ce processus de fermentation, réalisé avec des levures naturelles ou ajoutées, transforme le sucre en alcool, créant un « vin de canne » titrant à environ 5-6°. La distillation de ce vin produit un rhum à 55° environ par tonne de canne. Ce type de rhum se distingue par sa fraîcheur intense perceptible dès la première approche.


Le Rhum de Mélasse
Contrairement au processus agricole, le rhum de mélasse émane de la production de sucre. La mélasse, résidu riche en sucre issu du chauffage du jus de canne pour obtenir des cristaux de sucre, constitue ici la matière première. La mélasse, diluée dans l’eau, fermente pendant des durées variables, résultant en un spectre de rhums allant des plus légers aux « grand arôme » nécessitant jusqu’à 12 jours de fermentation. Ce processus transforme le sucre en alcool pour aboutir à la création du rhum de mélasse.


Diversité des Matières Premières, Richesse des Profils Aromatiques
La diversité des matières premières utilisées dans la fabrication du rhum engendre une palette aromatique vaste et variée. La mélasse, prédominante à plus de 90 % dans le monde du rhum, offre des notes de cassonade, de sucre brûlé et d’épices, malgré son aspect proche du caramel et son goût peu sucré de réglisse. Le jus de canne, utilisé pour les Rhums Agricoles, propose quant à lui un profil aromatique frais et végétal, mettant en lumière la canne à sucre elle-même.
Le sirop de canne, plus rare dans le monde du rhum, concentre le jus par évaporation, offrant ainsi un profil aromatique intense, à mi-chemin entre les rhums de pur jus et ceux de mélasse. Le miel de canne, une approche récente, confère des notes de canne confite et d’épices douces, indispensable pour certains Rhums d’Indication Géographique comme au Guatemala.


Fermentation et Distillation
La fermentation est un procédé chimique, qui transforme les sucres en éthanol par des levures, constitue une étape cruciale. Le contrôle de cette phase est essentiel pour éviter une concentration d’alcool trop élevée, néfaste pour les levures. Au cours de la fermentation, les levures vont donc transformer la mélasse ou le jus de canne en un « vin » : une boisson faiblement alcoolisée titrant entre 3%vol et 10%vol d’alcool selon la matière première employée et le temps laissé aux levures par les distillateurs pour faire leur œuvre. À la fin de ce processus, le sucre a été intégralement transformé en éthanol. La durée de fermentation dépend généralement du climent et de la rhumerie.

La distillation, opérée dans des alambics à repasse ou à colonne, différencie également ces deux types de rhums.
Les producteurs, enracinés dans les traditions les plus anciennes, se retrouvent souvent à choisir entre l’une ou l’autre forme de distillation, un choix largement influencé par l’héritage colonial du pays. Ainsi, les anciennes colonies britanniques et françaises continuent d’utiliser des alambics à repasse en cuivre, tandis que les anciennes possessions espagnoles privilégient principalement l’alambic à colonne. Le type de rhum résultant dépend fortement du mode de distillation adopté : de manière simplifiée, les rhums les plus robustes sont souvent issus d’alambics à repasse, car leur distillat est recueilli entre 68 et 70%, tandis que les rhums les plus légers proviennent d’alambics à colonne, avec un distillat recueilli à plus de 90%, laissant peu de place aux composants les plus volatils.


La distillation à repasse – représente cette méthode traditionnelle nécessitant des pauses régulières pour nettoyer l’alambic et lui permettre de se reposer avant d’amorcer une nouvelle session de distillation. C’est le mode de distillation le plus ancien et souvent privilégié par les producteurs traditionnels.


À l’opposé, la distillation à colonne – ou en continu – implique généralement deux ou quatre colonnes autoalimentées, éliminant ainsi le besoin d’interruption une fois que les colonnes sont opérationnelles. Ces colonnes sont composées de plusieurs plateaux de concentration à travers lesquels les vapeurs circulent, permettant de contrôler et d’orienter le profil aromatique du rhum. Ce processus permet de séparer les vapeurs les moins chargées en arômes, atteignant le sommet de la colonne, des composants plus lourds qui demeurent dans les plateaux inférieurs.

Le vieillissement dans le Rhum

Suite à la distillation, il a généralement 2 façon de faire vieillir le rhum.


Pour obtenir un rhum blanc, pas besoin de la passer en barrique, une stabilisation en cuve inox est suffisant. Le rhum blanc est généralement réduit à un niveau d’alcool approprié en utilisant de l’eau, de préférence la plus pure possible. Cette réduction est effectuée lentement afin de préserver ses arômes et son intensité. L’objectif est d’incorporer l’eau de dilution de manière à éviter l’apparition d’une saveur trop aqueuse. Par ailleurs, le temps lui-même joue un rôle crucial dans l’aération et l’harmonisation du rhum. C’est pourquoi certaines distilleries choisissent de laisser reposer, brasser et aérer le rhum pendant une période allant de quelques semaines à plusieurs années.


En revanche, afin d’obtenir un rhum dit “vieux”, il est nécessaire de passer le distillat dans des barriques. Ainsi, les rhums vieillis peuvent recevoir cette désignation après avoir mûri pendant au moins 3 ans. Au-delà de ce seuil, ils peuvent prétendre à d’autres appellations telles que le VSOP (Very Superior Old Pale) pour un vieillissement de 4 à 5 ans, puis le XO, signifiant très vieux ou hors d’âge, pour des durées dépassant les 6 ans.


Ces périodes de vieillissement prolongées transforment les rhums en enrichissant leurs profils aromatiques grâce à l’influence du fût, mais surtout en leur permettant de développer des caractéristiques propres grâce à une série de réactions chimiques. L’existence du rhum dans le fût confère de la couleur tandis que le contact avec l’oxygène favorise une oxydation qui modifie son caractère. L’interaction entre l’alcool et les acides gras du bois entraîne également un processus crucial appelé estérification, qui contribue à l’émergence de nouveaux arômes (connus sous le nom de congénères aromatiques), en plus de ceux déjà formés lors de la fermentation.


En l’absence de normes légales spécifiques, le processus de vieillissement du rhum et les pratiques d’appellation qui l’accompagnent varient considérablement d’un producteur à un autre. Bien que le vieillissement se déroule principalement dans d’anciens fûts de bourbon, certains utilisent des fûts de cognac ou de chêne neufs. Les affinages, moins fréquents, sont souvent le fruit de négociants français ou italiens, proposant des fûts de banyuls, de porto, de xérès ou de madère. Les barriques, élevées sur place dans les lieux de production, sont soumises à des conditions climatiques tropicales, ce qui entraîne une évaporation plus rapide que sur le continent.


Les nuances aromatiques issues du bois ainsi que les réactions chimiques au cours du vieillissement sont intrinsèquement liées au type de bois utilisé, à son traitement, à son chauffage, et à son environnement, bien que le processus de vieillissement soit soumis à des principes encore plus complexes.


Les fûts peuvent être neufs ou avoir été réutilisés de nombreuses fois. Certains vieux fûts, déjà épuisés de leurs composants, sont principalement utilisés comme conteneurs de stockage. D’autres ont peut-être précédemment accueilli d’autres types d’alcools comme le xérès, le porto, le vin, etc. Dans de tels cas, le bois libère également des caractéristiques de l’alcool précédemment contenu dans ses parois, en plus de ses propres attributs.


D’autres types de bois que le chêne peuvent également être employés : l’acacia, le châtaignier, voire une myriade d’autres essences exotiques utilisées, par exemple, dans la fabrication de la Cachaça au Brésil (Umburana, Jequitiba…).


Ces diverses essences de bois ou types de fûts peuvent être utilisés pour un processus de maturation complet, mais également combinés pour mélanger les influences des bois, par le biais de double maturation (comme illustré par le Plantation Barbade 5 ans vieilli dans des fûts ayant contenu à la fois du bourbon et du Cognac). Il est possible d’effectuer cette double maturation en partie sous un climat tropical et en partie sous un climat « continental ». Les finitions, quant à elles, consistent à affiner le rhum pendant quelques mois dans un fût marqué pour apporter une touche supplémentaire (comme le Plantation Pineapple vieilli dans un fût de whisky tourbé).


La problématique de l’évaporation est cruciale dans le processus de vieillissement, en particulier où le climat tropical exerce une forte influence. Le chêne, perméable aux molécules d’alcool et hydrophile, associé à des températures élevées et une humidité importante, provoque une évaporation substantielle et accélère la maturation. Vieillir dans ces climats équivaut à perdre entre 6 et 8% du contenu d’un fût chaque année, comparé à 2% dans des climats tempérés tels que l’Écosse ou l’Irlande. Ainsi, après 5 ans, il ne reste que 65% du contenu initial, environ 45% après 10 ans et 30% après 15 ans. En Écosse, il faudrait attendre 55 ans pour atteindre un tel taux d’évaporation. Malgré cette perte importante, le processus de vieillissement sous les climats tropicaux est accéléré. Deux années de vieillissement dans les Caraïbes équivalent à 6 à 8 années en Écosse.


Pour contrer ce problème d’évaporation, plusieurs solutions ont été envisagées, dont le transfert des barriques de rhum en Europe pour le vieillissement, sans affecter l’appellation. Deux perspectives s’affrontent : les partisans du vieillissement dans le pays d’origine et ceux préférant le vieillissement en Europe pour bénéficier d’une estérification et d’une oxydation plus lentes.

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